Citation

" La réalité c'est ce qui continue d'exister lorsque l'on cesse d'y croire"



Philip.K Dick







jeudi 16 septembre 2010

Histoire de Bas-Côté

J'ai un Tic génétique. Quand quelque chose suscite mon intérêt visuel, je ne le confronte pas de face, mes deux yeux parallèles à l'objet de ma curiosité, je tourne ma tête de profil et observe de côté, comme pour me concentrer sur un seul oeil plutôt que de profiter de ce que les deux m'apporteraient. C'est quelque chose que je ne contrôle pas, d'où le terme de tic, mais qui ne fait cependant pas partie de ceux dont on se debarrasseraient bien, puisqu'il est parfaitement justifié selon moi.

Chaque Handicap vous pousse à affûter d'autres sens, les aveugles surdéveloppent leur Ouïe et leur toucher, Les Sourds ,leur vue et perçoivent des vibrations qui nous sont inconnues, inconnues pourquoi? Parceque nous n'y prêtons pas attention, nous imaginons ne pas en avoir la necessité, nous sommes comblés par des sensations en abondance, et c'est bien là le soucis l'abondance, la multitude des choix, des possibilités, on se retrouve rassasié, satisfait, parceque plus on a de choix, plus on se sent libre et ça nous suffit, on ne cherche pas plus loin.

C'est pourtant en se privant d'une chose que l'on se retrouve en véritable face à face avec sa valeur. Je n'apprécie jamais autant quelque chose qu'en en étant privée. La privation nous pousse à nous dépasser, à aller au delà de nos capacités, elle développe de nouvelles aptitudes, nous modifie, nous remodèle, et plus encore nous reconcentre. La déconcentration, c'est la conséquence du trop, du vaste, du ailleurs, du autre chose, Plus vous réduisez votre monde et plus vous vous concentrez. Sur quoi? Sur ce dont vous ne vous privez pas. Vous découvrez alors ces choses que vous aviez jusqu'alors royalement snobé et qui aujourd'hui vous paraissent si évidentes, et absolument dignes d'interêt, vous rédéfinissez de nouvelles frontières,  remodelez votre perception , remettez en cause vos certitudes , réadaptez consciemment ou inconsciemment votre attitude,  focalisez votre attention sur de nouvelles obsessions, on se recentre, on approfondit, on s'affûte, on décortique , on se surmonte, on surdéveloppe, on détaille, la privation est un zoom considérable sur ce qu'il nous reste. 

C'est pourquoi il est bon parfois de se concentrer sur des choses restreintes, la possibilité peut tuer la capacité, plus c'est vaste, moins c'est gérable, on oublie l'essentiel, on bâcle, on survole, le trop tue c'est bien connu, parfois même on s'y perd, on y est tellement noyé de la tête au pied que l'on ne s'imagine pas un instant que cela pourrait être si différent, si satisfait, repus d'autant de trop on ne se rend même plus compte que l'on n'en garde qu'un résidu superficiel, comme une peinture dont on ne percevrait que les couleurs sans leur donner de forme.

La restriction, vous pousse à exploiter ce qu'il vous reste ,à vous concentrer, à perçevoir ce qu'il vous reste plus précisément mais également à observer d'un oeil plus objectif l'objet de votre privation.Vous perçevez dés lors la différence , il est toujours difficile d'être privé d'une chose après avoir été en sa possesion ,ne vous manque pas ce que vous ne connaissez pas, passé la période de sevrage, une fois débarrassé du manque ou bien peut être habitué à ce manque, comme on s'habitue à un nez que l'on n'aime pas particulièrement, vous pourrez décortiquer l'objet de votre privation sous un autre angle, justifier ou reconsidérer son importance, vous découvrirez alors sa vraie valeur, définie par ce qu'il vous en reste, ce petit résidu que l'on n'obtient qu'en s'en débarrassant, vous en récoltez l'essence.